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Le studio finlandais Remedy n’est jamais aussi bon que lorsqu’il s’agit de raconter une histoire par le biais de mécaniques de jeux éprouvées (et souvent d’un grand classicisme); avec Quantum Break, Remedy affiche de nouvelles ambitions, à la fois narratives mais aussi en terme de gameplay, des ambitions appuyées ici par de très gros moyens et un casting quatre étoiles. Aiden Gillen (Game of Thrones), Shawn Ashmore (X-Men), Dominic Monaghan (LOST, Le Seigneur des Anneaux) ou encore Lance Reddick (The Wire) prêtent non seulement leur image et leur mouvement pour le travail sur la mocap et les expressions faciales, mais jouent aussi réellement dans la mini-série intégrée au jeu. Quantum Break cherche donc à fusionner le drama des séries TV de type Netflix ou HBO avec des phases de TPS et d’exploration dans la veine des Remedy précédents (Alan Wake); mais cette mixture a t-elle du sens et enrichit-elle le jeu vidéo au sens large ? Analyse:
Jack Joyce (Shawn Ashmore) incarne dans Quantum Break la figure classique de l’aventurier involontaire, qui se retrouvera en position de jouer les héros par la force des évènements. Notre héros à l’air débonnaire est appelé en urgence par son ami Paul Serene (Aiden Gillen), un magnat-inventeur fou qui veut absolument lui montrer les avancées d’une machine à voyager dans le temps. Bien évidemment, ce qui ne devait être qu’une démonstration triomphante tourne au fiasco, et Jack Joyce est alors embarqué dans une aventure aux multiples ramifications. Voilà donc pour le pitch de base de Quantum Break, et il faut reconnaitre que Remedy possède l’art de pousser le joueur à adhérer à ses histoires : les cut-scènes réalisées avec le moteur du jeu, l’énorme travail sur les attitudes des personnages, les voix et la mise en scène générale font que l’on a très vite envie d’en savoir plus : qui est vraiment Paul Serene ? Pourquoi se retrouve t-il soudain à la tête de l’organisation totalitaire Monarch ? Les performances des consoles de nouvelle génération permettent désormais d’afficher des personnages humains crédibles, qui font que l’on oublie très vite les quelques petits défauts techniques pour mieux se plonger sans réserves dans l’histoire.
A partir de ce démarrage impressionnant, Quantum Break déploie sa structure ludo-narrative en 5 chapitres eux mêmes composés d’une première partie de gameplay en TPS (Third Person Shooter) suivie par une mini série qui débouche à chaque fois sur un choix crucial pour la suite des évènements (une JONCTION, qui va donner le ton du chapitre qui suit). Les phases de TPS sont du pur Remedy, c’est à dire plutôt stylées et assez coriaces en soi, mais aussi grevées par des problèmes techniques récurrents pour le studio (placement des caméras parfois hasardeux, visée pas toujours précise); malgré tout, ces soucis techniques sont assez vite gommés par les nouveaux pouvoirs de Jack Joyce, des pouvoirs qui lui permettent de geler le temps (et ses ennemis) sur une zone précise de jeu, de faire revenir le temps en arrière sur une courte période ou bien encore d’accélérer ses propres mouvements. Ces pouvoirs peuvent être upgradés, ce qui très vite permet des combinaisons et des stratégies particulièrement redoutables lors des confrontations (surtout que les ennemis, les sbires de Monarch, ne se privent pas eux-aussi de quelques « capacités » temporelles).
Les effets sont spectaculaires, et pourtant Remedy ne verse jamais vers le côté « too much » durant les phases d’action
Les effets graphiques qui soulignent ces pouvoirs temporels sont de toute beauté : voir Jack Joyce avancer au milieu d’une scène où tout est figé reste une expérience que seul le jeu vidéo peut proposer aujourd’hui. Les tirs de mitraillettes ennemis, les papiers dans l’air, les attitudes des corps: les « gels » temporels donnent lieu ici à des scènes surréalistes qui renvoient immédiatement à nos imaginaire de S.F. C’est incontestablement l’un des gros points forts du titre, et aussi ce qui permet d’éviter aux phases de TPS de sombrer dans des mécaniques trop classiques et répétitives. Intelligemment, certaines scènes du jeu placent le joueur dans la peau de Paul Serene, mais il est dommage que le studio n’ait pas renforcé ces inversions narratives qui auraient donné encore plus de sens aux décisions du joueur (notamment lors du choix de jonction).
Les jonctions sont des étapes importantes, qui ont des conséquences directes sur le scénario
Une fois que l’on a échappé à quelques salves d’ennemis à l’IA pas toujours très affutée commence alors l’acte deux du chapitre, soit une mini-série où les acteurs en chair et en os s’avèrent forcément encore plus convaincants que leurs avatars numériques; certes, la réalisation de ces passages « live » ne prétend pas égaler un HBO, mais dans l’ensemble cela fonctionne plutôt bien et l’on se prend même à poser la manette quelques instants pour suivre le spectacle. La durée de ces passages et le fait même qu’ils fassent largement avancer l’arc narratif justifient le choix de Remedy de ne pas avoir opté ici pour un (très) long cut-scene réalisé avec le moteur graphique du jeu. Pour autant, il n’y a pas de rupture violente entre le « live » et l’univers 3D du jeu. Remedy parvient même à bluffer son monde au moment où la série redevient « jeu », grâce à une scène clef où l’oeil peine à distinguer s’il s’agit encore du réel ou de l’univers 3D. A la fin de ces passages filmés, le joueur se voit proposer un choix narratif crucial, qui impactera sur la suite du scénario. « Passer en Force « ou « Manipuler les médias » sont quelques unes des jonctions narratives possibles, et force est de reconnaitre que chaque choix a des conséquences qui vont bien au delà du cosmétique.
Les mini-séries intégrées au jeu sont bien interprétées, mais manquent un peu d’audace de réalisation
Après un chapitre complet (Gameplay+mini série), le joueur rentre progressivement dans le tempo propre au jeu, et ce qui étonne d’emblée est de constater que malgré son scénario improbable, le jeu garde une grande cohérence entre ce que fait le joueur à l’écran et ce que raconte l’histoire, à contrario de certains titres où vous êtes par exemple sensé jouer un aventurier non violent…qui au final assassine des milliers de combattants ennemis. Remedy évite assez brillamment cette dissonance ludo-narrative, ce qui permet là encore de passer outre les petits détails qui clochent (détails d’ordre technique le plus souvent). Malgré tout, force est constater que le mix que nous propose le studio finlandais n’est pas absolument révolutionnaire en soi…ce qui n’est finalement pas très gênant. Le simple fait que cette mécanique à deux niveaux fonctionne est d’ailleurs sans doute la meilleure surprise du jeu, tant l’on pouvait craindre quelque chose de bancal, voire de disfonctionnel. Au final, les 5 chapitres de Quantum Break sont comme les étages d’une fusée que l’on placerait sur son pas de tir, le décollage final (au bout d’un douzaine d’heures de jeu) donnant la pleine mesure du projet original.
Quantum Break partait sur un concept très ambitieux et novateur, mais ce n’est finalement pas cette ambition affichée qui fait la force du titre de Remedy. Car si le jeu parvient à séduire sur la longueur, c’est avant tout grâce à une certaine « humilité » dans son approche globale (malgré les lourds moyens utilisés et le casting hollywoodien), un humilité qui lui permet de ne pas sombrer dans le clinquant inutile ou la dissonance ludo-narrative trop appuyée. Avec son scénario classique mais bien emmené et interprété, ses phases de gameplay coriaces et aux effets impressionnants (malgré quelques soucis techniques), Quantum Break réussit là où on l’attendait sans doute le moins : en étant avant tout un jeu « sérieux » et dense, qui impressionne par son manque d’esbroufe gratuite (le mal absolu de beaucoup de jeux next-gen). Le refus de Remedy d’aligner des scènes toujours plus spectaculaires sous le seul prétexte que le jeu vidéo ne serait là que pour procurer du plaisir est ce qui finit par rendre Quantum Break profondément séduisant au delà de ses défauts propres. Le jeu s’en tient à ses objectifs initiaux comme le chapeau chinois à son rocher : une intégrité devenue rare pour un titre AAA.
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22 Nov. 2024 • 20:27
22 Nov. 2024 • 19:54
22 Nov. 2024 • 18:36
22 Nov. 2024 • 18:15
la série est un peu moyenne mais elle se laisse regardée et reste agréable malgré tout.