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Il y a 4 ans, Satya Nadella, CEO de Microsoft déclarait lors d’une interview que le gaming n’était pas au coeur du business de Microsoft. Il y a quelques jours à peine, Microsoft a fait le plus gros rachat de son histoire en jetant son dévolu sur Activision-Blizzard-King pour 68,7 milliards de dollars. Dans l’intervalle, beaucoup de choses se sont forcément passées, et le pavé dans la mare de la firme de Redmond, qui en appelle sans doute d’autres, mérite quelques éclaircissements au vu des nombreuses questions qu’il suscite. Avec les éléments dont nous disposons à date, et en avançant les hypothèses qui nous semblent les plus probables (à date toujours), voici donc notre premier débrief du rachat de l’année, sous forme de FaQ :
Depuis l’annonce du rachat, il y a sans doute un peu de drama (parfois surjoué) concernant les forces et les faiblesses respectives de Sony et de Microsoft (pardon, de Xbox et de PlayStation), et la chute brutale du cours de bourse de Sony (-20% dans l’heure suivant l’annonce) pouvait ressembler à un début de panique. Une prise de recul est toutefois nécessaire. Avant le rachat d’Activision, et même après le rachat de Bethesda à vrai dire, PlayStation dominait largement le jeu des exclusivités sur la old et la new gen, (PS4/PS5), non seulement par le biais de ses studios first party (Naughty Dog, Guerrilla, Insomniac) mais aussi via les nombreux accords d’exclusivités ou contrats commerciaux passés avec des studios tiers.
Street Fighter, Persona ou bien encore Final Fantasy VII ne sont toujours pas disponibles sur Xbox, la scène eSport de Call of était jusqu’ici aux couleurs de PlayStation (même si les tournois sont bien entendu sur PC), et l’on pourrait aussi citer les deals signés avec Arkane ou Tango, qui expliquent pourquoi les joueurs Xbox devront attendre pas mal de mois avant de pouvoir jouer à Deathloop ou Ghostwire Tokyo. De fait, Xbox a toujours eu un mal fou à obtenir des deals équivalents et il est sans doute apparu évident à Phil Spencer qu’il était finalement plus facile de racheter un studio que de négocier un contrat d’exclusivité. Le rachat d’Activision-Blizzard ne changera pas frontalement la donne des exclusivités, mais les inconnues qui planent encore sur Call of Duty, et surtout le modèle économique du Game Pass posent d’autres types de problèmes à PlayStation.
La question est en fait assez simple : qui acceptera demain (pas tout de suite) de payer 80 euros un jeu AAA (ou AAAA) si des titres équivalents se trouvent sur un service par abonnement entre 10 et 12 euros/mois ? Sony n’a peut-être pas fait le meilleur choix en augmentant le prix de ses exclusivités first party sur la génération PS5, même s’il ne faut pas oublier qu’une partie non négligeable des joueurs PlayStation sont très attachés aux franchises de Sony. Hellblade 2 mettra peut-être tout le monde d’accord, mais celui qui voue un culte à Kratos n’ira pas facilement voir ailleurs de toute façon. En revanche, les joueurs un peu plus casuals, ou qui ont une PlayStation plus par habitude qu’autre chose, pourraient bien être tentés de basculer vers une machine (Xbox Series) ou un service blindé de gros jeux pour un coût minime. Dans l’immédiat, et même en comptant les revenus générés par Activision-Blizzard, il faut rappeler que Xbox pèse toujours moins que Sony dans le secteur du gaming (PlayStation reste à la seconde place du marché du jeu vidéo derrière Tencent).
Redisons le ici : les autorités de régulation ne sont pas là pour lutter contre les positions dominantes mais contre les abus supposés (ou qui pourraient advenir) liés à cette position dominante. Sur un plan simplement factuel, Sony ne se retrouve pas « touché à mort » après ce rachat (voir ci-dessus), ni financièrement (Sony restera devant Microsoft après le rachat), ni en terme de jeu (PlayStation a toujours plus de deals d’exclusivités qu’Xbox ne dispose de studios first party). Reste le cas Call of Duty, qui pourrait être en effet utilisé comme un moyen de tordre le marché au profit de Xbox au vu de l’extrême popularité de la franchise (entre 10 et 20 millions de ventes sur PlayStation… CHAQUE ANNEE !). Sur ce sujet, Phil Spencer a eu pour l’instant le bon goût de jouer la prudence et l’apaisement. Sur un plan plus « technique » cette fois, rappelons que le rachat ne sera validé (ou rejeté) par les autorités de régulation qu’au mois de juin 2023.
Cette hypothèse a été évoquée dans plusieurs médias, et pourtant c’est l’une des plus improbables, même si des bruits courent que Phil Spencer aurait déjà tenté de négocier l’arrivée du Xbox Game Pass sur consoles PlayStation et Nintendo (sans succès donc). C’est très improbable pour la simple et bonne raison qu’il y aurait de gros risques que cela soit vu par les régulateurs comme une stratégie anti-concurrentielle, Xbox utilisant sa mainmise sur un jeu ultra populaire pour faire du chantage et imposer un service lié à ce même jeu. On aurait même double combo de pratiques anti-concurrentielles ici puisque la manoeuvre implique que dans un premier temps Microsoft refuserait totalement de laisser Call of Duty (y compris le multijoueurs donc) sur PlayStation.
On se souvient en effet du coup de gueule récent de Phil Spencer contre la gestion interne désastreuse de Bobby Kotick (CEO d’Activision-Blizzard), qui pouvait laisser entendre que Xbox pourrait même revoir ses relations avec Activision-Blizzard si rien n’était fait pour lutter contre les débordements de toutes sortes (menaces sur les employés, harcèlements sexuels, ambiance toxique sur le lieu de travail, etc.). Le fait est que selon plusieurs sources, ce serait bien la direction d’Activision-Blizzard qui aurait contacté Xbox en urgence pour se faire racheter, après d’ailleurs un refus sec de Facebook (plutôt branché sur son Métavers VR). Il est donc tout a fait possible que le deal n’était pas encore conclu (et pas en voie de l’être) lors des déclarations de Philou.
Phil Spencer l’a en effet dit dans un tweet au ton un peu paternaliste : Sony est un partenaire qui compte, la franchise Call of restera sur PlayStation et les accords contractuels passés entre Activision et Sony seront respectés jusqu’à leur terme. Ce serait vraiment merveilleux si TOUT ce que dit ou publie Phil Spencer jusqu’à la finalisation du rachat n’était pas scruté à la loupe par les régulateurs anti-trust américains, européens et chinois. Phil Spencer est en outre parfaitement au courant de cette « surveillance ». En d’autres termes, ce n’est certainement pas maintenant que l’homme fort de Xbox dira des choses désagréables alors qu’il sait que le moindre de ses mots compte triple. Et entre les lignes, il est déjà possible de livrer des « interprétations de texte » un peu moins favorables pour Sony.
Call of Duty pourrait par exemple rester sur PlayStation… mais seulement le multijoueur (Warzone), le mode campagne étant réservé aux joueurs Xbox (comme ce qui s’est passé pour Elder Scrolls du reste, Elder Scrolls VI étant annoncé comme une pure exclusivité PC/Xbox Series). On peut aussi imaginer des contenus spéciaux, des exclus temporaires, etc. Dans le meilleur des cas, un nouveau Call of dispo day one dans le Xbox Game Pass aura forcément un certain attrait par rapport au jeu neuf vendu 70 euros sur PS5. Et ne parlons pas de la scène eSport, qui va se parer des belles couleurs vertes et noires de la Xbox. Enfin, et il est assez étonnant que si peu de journalistes ou observateurs en aient parlé, le simple fait que Phil Spencer fasse aussi publiquement attention à l’avenir de Call of sur Play semble indiquer en creux que TOUTES les autres franchises d’Activision-Blizzard seront bel et bien des exclusivités consoles côté Xbox Series. Overwatch, Diablo et tout le reste, ce sera sans doute uniquement sur Xbox (et le Game Pass).
C’est la petite musique que l’on entend parfois concernant le rachat d’Activision-Blizzard. Microsoft aurait récupéré une coquille vide et malade, essorée par les affaires internes. C’est oublier un peu vite que même un Call of « moyen » reste un blockbuster en terme de ventes (et ce dans de nombreux pays), que King est une énorme machine à cash, et que la culture d’entreprise très « inclusive » de Microsoft est plutôt un atout, et non un malus, dans l’optique de ce rachat et dans le contexte actuel des troubles sociaux internes à Activision-Blizzard. Quant au faible nombre de grosses franchises actives, il faut tout de même rapeller qu’Activision-Blizzard dispose des droits sur un très grand nombre de franchises en dormance ou mises à la benne par le directoire de Kotick tout acquis à la cause du dieu pognon.
Phil Spencer a précisé il y a deux jours sur Twitter qu’il rêvait déjà du retour de certaines franchises détenues par Activision-Blizzard, comme Hexen, Starcraft ou King’s Quest par exemple. Ce ne sont sans doute pas des paroles en l’air : le patron de la branche gaming de Microsoft sait très bien qu’un service par abonnement a besoin de nombreux contenus différents pouvant cibler tous les types de joueurs. Le rachat lié de King coche d’ailleurs une case qui était jusqu’ici manquante dans l’équation Game Pass, celle des jeux ultra casuals. Cela tombe bien : Spencer avait concédé il y a deux ans que le Game Pass ne proposait pas assez de titres destinés à la famille et aux casus.
Bien entendu, rien n’a encore filtré et l’on sait juste que le CEO (très) contesté d’Activision-Blizzard fera la transition avec les équipes de Xbox jusqu’à la date du rachat effectif. Mais ne faisons pas mine de créer du suspens là où il n’y en a pas vraiment : il serait plus que douteux, pour ne pas dire extrêmement improbable, que Kotick ne soit pas éjecté de son poste à peine le rachat pleinement officialisé. Si la justice ne le rattrape pas entre temps, Kotick quittera son poste de CEO avec des centaines de millions de dollars en poche issus de la vente de ses actions Activision et du somptueux parachute doré qui lui est déjà promis. Difficile de prétendre qu’il ne s’en tire pas royalement au vu des circonstances.
C’est LA grande question que doit en effet se poser la direction actuelle de PlayStation. Nintendo parvient à faire mieux qu’exister en cultivant sa différence, celle d’une console hybride et de jeux qui ne participent pas à la course aux graphismes hyper réalistes pour séduire les joueurs. Problème, les jeux first party de Sony sont positionnés sur le même « créneau » que les gros titres de Xbox, et le géant japonais n’a sans doute pas les poches assez profondes pour suivre Microsoft à la culotte sur le terrain des rachats de studios alimentant un service de type Game Pass. Que faire alors ? Peut-être est-il temps pour Sony de cultiver à son tour ce qui fait aujourd’hui SA grande différence avec Xbox, c’est à dire… la VR. N’est-il pas temps pour PlayStation d’y aller à fond sur un marché certes encore balbutiant mais où demain les places seront sans doute très chères (Meta aujourd’hui, demain Apple…) ? Malgré l’annonce d’un casque PSVR 2 aux spécifications très correctes, on ne sent pas encore Sony totalement investi dans ce qui pourrait pourtant constituer une « seconde voie » royale. D’ailleurs l’épisode Horizon qui sera disponible au lancement du PSVR2 n’a pas été développé par le studio Guerrilla. Et si Sony poussait VRAIMENT son avantage sur ce terrain qu’Xbox a décidé (pour l’instant) de snober ?
Si, Phil Spencer est sans conteste un gars très malin et un poil visionnaire même. Il en fallait de la vision et de l’audace pour convaincre un Nadella tout acquis à la cause des services cloud pour les pros (Azure et consorts) que le jeu vidéo devait redevenir central chez Microsoft. Les 70 milliards du rachat, c’est le symbole de l’immense confiance que l’équipe dirigeante de Microsoft place désormais dans « Philou le bon bagout ». D’ailleurs, en même temps que l’annonce du rachat, Phil Spencer a été bombardé à la tête de Microsoft Gaming, la nouvelle entité « jeu vidéo » de Microsoft. Il fallait de la vision aussi pour croire dans l’avenir d’un service par abonnement au moment où les joueurs affichaient encore (moins maintenant) leur attachement au modèle de la vente physique.
Il n’a pas manqué de persévérance non plus pour y croire à une période particulièrement difficile de la branche Xbox, reprenant les rênes d’une division jeu à la dérive et sans capitaine. Pour ne rien gâcher, Spencer se révèle aussi être un vrai as de la communication sous ses airs bonhomme. Un ton posé, toujours un mot doux pour la concurrence, ce qui ne l’empêche pas d’agir de façon froide et décidée lorsqu’il le faut (car Phil est aussi un grand pragmatique). Les rachats de Bethesda puis d’Activision en sont la preuve.
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Merci pour ce bel article et analyse pertinente.