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Des chercheurs de l’Académie pékinoise des sciences de l’information quantique (BAQIS) ont conservé des informations sous forme de lumière pendant 4035 secondes. Ce jalon (plus d’une heure de stockage) change d’échelle et confirme que la lumière peut, dans certaines conditions, devenir un support de mémoire exploitable pour l’informatique quantique et les réseaux quantiques de demain.
La lumière transporte l’information via des photons, des particules sans masse qui filent à la vitesse limite de l’Univers. Cette rapidité fait la force des communications optiques, mais c’est aussi l’ennemi d’une mémoire stable : à la différence des électrons confinés dans un transistor, les photons traversent un dispositif sans s’y « poser ». À cela s’ajoute une autre contrainte : même si l’on parvient à les ralentir, il faut préserver leur cohérence (phase, fréquence, polarisation) pour que l’information restituée soit fidèle. Les dispositifs expérimentaux réussissaient jusqu’ici des stockages ultracourts, souvent fragmentaires, insuffisants pour une exploitation à grande échelle.
Pour franchir ce plafond de verre, l’équipe a choisi une stratégie élégante : convertir temporairement l’information lumineuse en une excitation mécanique, autrement dit en « son ». En physique, cela revient à transférer l’état d’un champ optique vers une vibration du réseau cristallin (un phonon) au sein d’un matériau spécialement choisi. Comme ces ondes mécaniques évoluent des millions de fois plus lentement que la lumière et peuvent être confinées très efficacement, elles constituent une « mémoire tampon » idéale avant reconversion en photon à la demande.
Le support retenu est un film de carbure de silicium (SiC) monocristallin, réputé pour ses faibles pertes internes, sa stabilité de fréquence et sa compatibilité avec les procédés micro-fabrication. Deux propriétés clés en font un candidat de premier plan :
En pratique, l’impulsion optique incidente « écrit » l’information dans le mode acoustique du film ; après une durée programmée, un second signal déclenche la « lecture » et reconvertit la vibration en lumière, avec l’information intacte.
Le résultat — plus d’une heure de rétention avec maintien de la stabilité fréquentielle à très basse température — dépasse nettement les précédents records, souvent limités à des fractions de seconde ou quelques minutes selon les plateformes. Ce saut quantitatif entraîne un basculement qualitatif : on peut désormais envisager des protocoles complets (écriture, conservation, lecture) cohérents avec les exigences d’un réseau quantique distribué, où les photons doivent parfois « attendre » que d’autres nœuds fassent leur part du travail.
Les applications se déclinent immédiatement :
Un record de durée ne fait pas à lui seul un produit industriel. Plusieurs chantiers sont déjà identifiés :
Au-delà de la performance brute, le choix du SiC est stratégique. Ce matériau possède une maturité industrielle (optoélectronique de puissance, LED, capteurs) et un écosystème de fabrication déjà rodé. Sa compatibilité avec des centres de couleur (défauts atomiques utilisables comme qubits) autorise, à terme, des architectures hybrides où défauts électroniques, photons et phonons se partagent la tâche : calcul local, transport d’information et stockage temporaire.
Le véritable message derrière « 4 035 secondes » n’est pas qu’un chronomètre a tourné plus longtemps : c’est la validation d’un paradigme d’ingénierie — convertir la lumière en vibration puis la reconvertir avec précision — sur une plateforme matérielle réaliste. L’écosystème quantique a besoin de briques polyvalentes : sources de photons indistinguables, circuits photoniques, détecteurs efficaces… et désormais, des mémoires optomécaniques crédibles. En combinant durée de stockage, stabilité et perspectives d’intégration, ce travail rapproche l’idée de réseaux quantiques opérationnels et d’une informatique photonique plus modulaire.
Les prochaines étapes sont claires : passer du démonstrateur au pilot intégrable, prouver le fonctionnement en multiplexage (plusieurs paquets d’information conservés simultanément), valider la compatibilité avec les longueurs d’onde télécom, et documenter la robustesse en conditions réelles (vibrations, cycles thermiques, vieillissement). Si ces verrous s’ouvrent, les acteurs des télécoms, du cloud et de la cybersécurité disposeront d’une nouvelle classe de composants pour leurs routes optiques.
En un mot, transformer la lumière en son pour mieux la retrouver relève moins du tour de magie que de l’architecture système : c’est l’art d’accorder des échelles de temps incompatibles. Avec ce record, la mémoire photonique quitte la capsule de laboratoire pour entrevoir le monde industriel. Reste à orchestrer les dernières pièces pour que la symphonie quantique se joue hors des salles blanches.
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17 Oct. 2025 • 20:51
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